Premier de deux articles sur le sujet passionnant des balises de sentier et de celles et ceux qui les ont installées.
le second article : Si les balises m’étaient contées.
Aux confins des Laurentides, le Mont Kaaikop possède ses légendes, ses géants tristes, ses sentiers et… ses balises. Mille et une balises. Compte rendu ludique d’une randonnée hivernale hors du temps.
Cette haute montagne dénudée, escarpée et rocheuse, Kaaikop en algonquin, offre un point de vue exceptionnel sur les Laurentides. Nous sommes montés par l’est au départ de l’Interval, Coopérative de solidarité de plein air de Ste-Lucie-des-Laurentides. Tout se passe bien, le sentier est bien balisé, « Vous êtes au 1/4 de la montée », « Vous êtes à la 1/2 de la montée », « aux 3/4 »… c’est encourageant. Le sentier est bien damé, il n’a pas neigé depuis plusieurs jours. Si la plupart des randonneurs font la petite boucle de 5 kilomètres, nous optons pour le Grand Tour de 12,5 km, le sentier 7GT, qui va rejoindre le Sentier national au Québec (SNQ) avant de revenir vers l’Interval par le sentier Inter-Vals.
Juste après avoir franchi le sommet, nous traversons une sorte de faille temporelle. Nous quittons le sentier moderne avec ses balises toutes récentes pour, tout d’un coup, se retrouver, des décennies plus tôt. Oh ! On ne ressent rien bien sûr, jusqu’à ce qu’on observe, sur un arbre, une balise d’une autre époque. Elle est ronde et ondulée. De plus près, en regardant bien, on dirait bien qu’il s’agit d’un couvercle de boîte de conserve peint en jaune et orange. On dirait même que cette balise est incrustée dans l’écorce de l’arbre. Il n’y a pas à dire, nous venons de faire un saut important dans le temps. Un peu plus loin, une autre balise, différente, nous indique que nous sommes sur le sentier Kaaikop, nous reconnaissons les couleurs orange et jaune.
Couvercle de boîte de conserve encastré dans l’écorce Était-ce le nom original de ce sentier Kaaikop ?
C’est alors que s’en suit une enfilade de balises, toutes différentes les unes des autres, certaines se répétant, d’autres d’uniques représentantes d’un balisage lointain. Je me mets alors à les photographier, mais alors, seulement celles différentes des autres, comme pour témoigner de notre passage à travers la faille temporelle.
Au fil des pas, toujours sur le même sentier, en l’espace de quelques kilomètres, les balises nous parlent. Elles nous racontent l’histoire du sentier, des pionniers qui l’ont défriché, des bénévoles qui se sont succédés pour le garder bien vivant. Certaines étaient artisanales, faites avec les moyens du bord. Je me dis que les boîtes de conserve furent les premières à marquer la piste, mais comment le savoir ?
Le métal laissa place à d’autres matériaux et la forêt ne fut pas épargnée par la révolution du plastique. Il y en a bien quelques unes en bois mais elles sont si rares qu’elles n’ont pas dû résister à l’épreuve du temps.
Le marquage du sentier 7 a pris plusieurs formes, sur plusieurs cycles de balisage au fil des années.
La modernité s’est exprimée aussi dans le nom du sentier. On se doute bien qu’au début, il devait s’appeler Kaaikop. Il portait bien son nom. Il s’appelle maintenant No 7. Dommage tout de même. Les cycles de balisage se sont succédés, arborant le même chiffre. Combien il y en eut ? Quatre au moins, difficile à dire, certaines balises couvrent le sentier en entier, d’autres n’apparaissent qu’une ou deux fois. Il faut dire que le plastique se dégrade rapidement.
Arrivés à une croisée des chemins, un saut inattendu de la faille temporelle nous ramène à nos jours. L’excellent balisage effectué par le Club de Plein Air St-Donat nous impressionne. Nous remarquons des balises un peu spéciales, tout en bas, des balises d’urgence qui, en cas de pépins, aideront les sauveteurs à nous localiser.

En poursuivant notre chemin sur le sentier du Mont Ouareau, de retour dans le temps, de nouvelles balises apparaissent. Elles sont différentes de celles croisées jusqu’ici. Ce sont les balises rouge et blanc du Sentier National au Québec (SNQ) qui, si l’on en croit les inscriptions, devait s’appeler autrefois Sentier Pédestre National (hiking trail). Sa gestion est aujourd’hui confiée à Rando Québec. Ces balises ne remplacent pas les autres, non, elles s’y ajoutent ! Mais n’ayons crainte, la forêt ne manque pas d’arbres pour les y poser.
Balise rouge et blanc sur losange métallique jaune Sentier pédestre NATIONAL alias 7 alias Sentier du Mont Ouareau
Comme pour le sentier du Mont Kaaikop, le Sentier National a vécu plusieurs cycles de balisage si l’on en croit les différentes versions allant de la peinture sur l’écorce, aux plaquettes de bois et de métal.
Plaquette de bois Peinture sur écorce, plaquette métallique

Il faut dire que le balisage est un ouvrage sans cesse à renouveler. Les balises ne sont pas éternelles et les baliseurs doivent constamment les rafraîchir. Le choix des matériaux s’avère important, certains étant plus résistants que d’autres. L’ancrage des balises a aussi fait l’objet d’études pour minimiser les impacts sur la santé de l’arbre, et….. des balises.
Le plastique coroplast subit les affres des rayons solaires La peinture noire a protégé le plastique fragile
Ne reste plus qu’un demi-cercle On perdra bientôt son algonquin ! Une balise en train d’être avalée par cet arbre gourmand
Ce qui nous a frappé, en cette journée de randonnée, ce ne sont pas les balises qui marquent le chemin. Ce sont celles qui nous racontent l’histoire des pionniers qui ont défriché le chemin, des baliseurs qui l’ont gardé vivant. Nous ne les croisons jamais.
On remarque surtout le passage des autres randonneurs. Leurs pas ont laissé des traces. Souvent on les croise et on se salue. En montée, on baisse la tête, on ahane péniblement ne relevant la tête que pour vérifier si on est toujours sur le bon sentier. Tiens une balise, ouf !
Ce petit texte veut saluer le travail des pionniers et des baliseurs bénévoles, leur rendre hommage, leur dire merci. Ils sont là depuis longtemps, ils se succèdent depuis des décennies. Leur histoire se perd, j’en ai bien peur. Alors, quand nous randonnerons en forêt, à la vue d’une balise, saluons les baliseurs et rendons-leur hommage en prenant soin du sentier à notre tour.
Mais au fait, qui sont-ils, ces bâtisseurs qui ont défriché et balisé ce beau sentier du Mont Kaaikop ?
Ne ratez pas la suite dans le deuxième article: Si les balises m’étaient contées.
Repères
Pour en savoir plus sur le Mont Kaaikop et l’Interval, Coopérative de solidarité de plein air:
Pour en savoir plus sur le Club de plein air St-Donat:
Pour en savoir plus sur Rando Québec et le Sentier National au Québec (SNQ):
Trajet parcouru lors de notre randonnée (les photos ont été prises entre le km 3 et le km 9):

Avec toutes ces balises, Impossible de se perdre !! …. ( en espérant toutefois que ça n’ait pas justement l’effet contraire…) mais comme vous en êtes revenus pour nos raconter votre histoire, faut croire que non…. 😁👍
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C’est toujours déstabilisant de voyager dans le temps. Attendez de lire le 2e article…..
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Ping : Si les balises m’étaient contées – Derrière l'horizon
Intéressant! Y’a des arbres mangeurs de balises et y’a des humains mangeurs de km. Hi hi
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Merci pour ce retour en 1993, combien de fois j’ai skié la 7 avec les trippeux d’la patrouille.
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Rachel, peut-être y a-t-il des gens que vois avez connus cités dans l’article Si les balises m’étaient contées…
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